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Trek Mestia-Ushguli

 

20-23/08/2019 (Jours 14-17)

 

Après un bref petit-déjeuner, on se rend à l'enregistrement et là gros quiproquo.

 

L'hôtesse confond bagages à main et bagages en soute... Elle nous interdit d'embarquer. Marie tente d'expliquer que sur leur site les bagages de moins d'une douzaine de kilos sont acceptés.

L'hôtesse s'énerve, nous prend de haut et se met à nous crier dessus. Le ton monte et on finit par quitter l'aérodrome.

La dispute nous laisse un goût amer surtout qu'hier si la réceptionniste nous en avait fait part on aurait pu prendre anticiper et prendre les devants. Là on est devant le fait accompli et si on ne peut prendre l'avion c'est près d'une dizaine d'heures de bus.

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On se rappelle alors que lors du petit-déjeuner, les pilotes étaient juste derrière nous. On va les voir et on explique le problème. Ils semblent surpris car pour eux il n'y a aucun problème... On retourne voir à l'aérodrome et de nouveau l'hôtesse ne veut rien entendre. Finalement, je ne saurai même plus dire comment, cette dernière se rend compte de sa méprise. Pas une excuse rien. Mais bon, le sac est dans l'avion c'est tout ce qui compte.

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"Il faut être économe de son mépris en raison du grand nombre de nécessiteux."

Chateaubriand

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La vue de l'avion, malgré le fait que le ciel soit couvert, est superbe. On survole les grands massifs du Caucase, avec leurs glaciers suspendus.

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Portés par le chant des hélices et le défilement des montagnes, le voyage éclaircit l'esprit. Certaines idées me quittent alors que d'autres s'ajustent.

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On arrive à Mestia et, après avoir déposé une partie des affaires dans un hôtel, on débute le trek jusqu'à Ushguli. Il y a une soixantaine de kilomètres de marche, le tout en 3 j. Cette fois-ci on dormira chez l'habitant, pas de tente ! 

 

Rapidement on convient que ce trek sera moins sauvage que le précédent (Omalo-Shatili), ou du moins la sensation de solitude sera bien moins présente. On traverse un certain nombre de villages, plus ou moins fantômes, les gens nous regardent avec curiosité bien que ce trek soit très connu.

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On s'habitue aux tours svanes, bien différentes de celles touches.

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Cette première étape ne sera pas mémorable, en revanche la chambre d'hôtes le sera beaucoup plus... dans le mauvais sens du terme.

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Après s'être trompés d'adresse nous trouvons enfin ce qui nous semble être le bon lieu. Nous rentrons mais personne pour nous accueillir si ce n'est un chien particulièrement agressif. Quand enfin quelqu'un vient, ce n'est guère plus docile qu'avec le chien. Le lieu est spartiate et sale. Nous qui étions content d'en finir avec la marche, on hésiterait presque à repartir ! Au dîner on osera à peine toucher nos assiettes, c'est dans cette ambiance quelque peu glauque qu'on va se coucher.

Ce n'est pas sans mal qu'on quitte notre hôte. Ce dernier nous précisera tout de même qu'on arrivera jamais à Khaled ce soir "c'est trop loin, pas possible". Sur l'instant, on ne comprends pas tellement cette mise en garde. Certes une longue journée de marche nous attend mais ça nous semble possible... On a connu pire avant !

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En s'éloignant de la vallée, on abandonne quelque peu le paysage rural pour embrasser la forêt humide avant de rejoindre une crête avec quelques télésièges... On s'inquiète un peu sur l'intérêt de ce trek.

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La descente dans l'autre vallée rassure, les fleurs nous entourent tandis que des balcons dégagés offrent une vue sans pareil sur les reliefs voisins.

 

On croise des cavaliers qui nous demandent où l'on va "Khaled !" "aujourd'hui ?". Ils se mettent à rire et s'en vont. Inutile de préciser qu'on s'interroge, sans comprendre le pourquoi de ces mises en garde.

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On atteint Adishi, tombant à moitié en ruines. 

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Il y a une atmosphère étrange dans ce village, la même qui baignait ceux d'hier.

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Le regard des villageois, froids, et le silence total accentue le caractère pesant et austère de ces lieux isolés du monde extérieur.

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Il me semble que c'était Maria Rilke qui écrivait "Si votre quotidien vous paraît pauvre, ne l'accusez pas, accusez-vous vous-même de ne pas être assez poète pour appeler à vous ses richesses."

Oui enfin il est des lieux où appeler ces richesses c'est plus difficile que d'autres.

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Après une pause déjeuner, on reprend le chemin vers Khaled en remontant la vallée. On devine au loin, entre deux nuages, de hautes cimes aux glaciers suspendus.

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A leurs pieds, un torrent glaciaire... infranchissable. On tentera bien en différents endroits mais le débit important effraie. Pendant près de 30 minutes on s'efforcera de trouver un chemin, mais sans cesse je recule.

Ce que je ne comprend pas c'est qu'au déjeuner, une dame partait dans cette direction et en l'occurrence on ne la voit pas... Par où a-t-elle pu passer ?

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Sur le chemin de retour vers Adishi, un guide nous explique que le torrent est franchissable que le matin. Ensuite, avec la chaleur de la journée, la fonte du glacier s'accélérant, le torrent gonfle et devient trop puissant pour être franchit à pieds. Lui pense dormir à côté et le traverser demain à l'aube.

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Malheureusement, nous n'avons pas notre tente, donc deux choix s'offrent à nous : soit on dort à Adishi et on retente demain à la première heure, soit on cherche un véhicule à Adishi pour qu'il contourne la montagne par la petite route pour atteindre Khaled. C'est cette dernière option qui sera retenue.

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De retour au village, les cavaliers qui rigolaient de nous toute à l'heure, sourient et nous demandent si on veut dormir quelque part ou s'ils peuvent nous emmener quelque part. On refuse, n'ayant pas confiance et puis leur en voulant aussi de ne nous avoir pas prévenu plutôt que de se moquer.

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Celui qui nous a servi le déjeuner, après de longues discussions, se décide de nous y emmener.

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Je ne sais pas quels sont les chiffres de la sécurité routière dans ce pays. Mais quand vous voyez votre chauffeur respirer profondément, se signer, embrasser sa croix, avant d'accélérer soudainement et se lancer dans les routes de montagnes à toute allure, et recommencer autant de fois qu'il y aura de virages. Vous flippez un peu. On prie pour qu'il ait assez prié.

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La route est longue, compliquée, prouvant combien les villages sont isolés les uns des autres mais enfin on arrive.

 

Et cette fois-ci la chambre d'hôtes répondra à toutes nos attentes ! On se délecte de choses simples, d'une douche chaude, de bons repas... seul les ressorts du lit nous laisseront un souvenir désagréable.

Départ matinal, une longue journée de marche nous attend puisqu'on compte faire un crochet vers le col qu'on a loupé hier, revenant ainsi pratiquement au niveau du torrent.

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Bien nous en a pris ! Le ciel est dégagé, contrairement à notre passage de la veille, et la vue est superbe.

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D'où vient l'étrange attirance de ces cimes, si tenaces, datant d'une nuit au-delà des âges. On croit voir ce qui sera et ce qui a été, en un regard on a traversé des siècles, la vue élargit on respire plus largement et plus solennellement.

Nous ne sommes pas prêt d'oublier la beauté des géants du Caucase.

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D'où vient l'étrange attirance de ces cimes, si tenaces, datant d'une nuit au-delà des âges. On croit voir ce qui sera et ce qui a été, en un regard on a traversé des siècles, la vue élargit on respire plus largement et plus solennellement.

Nous ne sommes pas prêt d'oublier la beauté des géants du Caucase.

 

A regret, on entame la redescente et partons à l'exact opposé... traverser un nouveau torrent. Soi-disant il y a un pont.

 

Alors oui, il y a bien un pont mais il n'y a pas de sentier ! On tente tant bien que mal de nous frayer un chemin dans la côte. C'est une corvée. Si la vue depuis le col atteint dans la sueur efface les "souffrances" endurées... elle annonce aussi la difficulté de la redescente toujours sans sentier.

 

Au loin, l'autre vallée, perpendiculaire à la nôtre, qu'il faut garder comme cap : elle nous emmènera tout droit sur Ushguli.

 

Une fois je tombe, puis deux, puis trois, je peste lorsque je manque de me faire vraiment mal, je rumine, je croise les doigts pour qu'on rentre avant la nuit. Marie surveille le GPS pour tenter de retrouver un semblant de sentier, mais pour le moment il n'en est rien.

 

Il faut savoir que le "vrai" tracé du trek longe la route à partir de Khaled jusqu'à Ushguli. Voyant sur maps.me un semblant de tracé à travers les cols, nous l'avions pris pour variante.

 

Enfin on récupère un chemin, on redescend dans la vallée et longeons la rivière. Au loin Ushguli et notre chambre d'hôte. Je m'en réjouis. 

 

Je râle, mais dans le fond je suis heureux d'avoir fait ce trek, ces rencontres aussi. Il en va toujours ainsi, de mes contradictions et de mes insatisfactions je me propulse hors de l'instant.

 

En attendant on se propulse sous la douche, sans râlerie promis, puis dîner dans un bar en entrée de la ville. Le charme opère déjà et suis pressé de mieux découvrir les lieux demain.

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Les tours Svanes avec en toile de fond les glaciers.

Je demeure charmé par la puissance si tenace de ces lieux, pourtant déserts et terrifiants, qui suggèrent que les choses viennent de loin et que le temps les effleure à peine sans les entamer.

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En pénétrant dans le monastère, nous sommes témoins d'une prière orthodoxe.

"[...] une colonne d'encens s'élevait, grossissait, s'évasait comme un orme de fumée dans les rais du soleil. La psalmodie se faisait de plus en plus complexe, qui se tenait au milieu de la travée, et leurs voix polissaient des chants que les neumes noirs grégoriens, aux queues de comètes, aux arabesques d'allures mauresques, tissaient et retissaient sur le fil de portées antiques de quatre lignes, sur les pages des graduels. [...]"

Patrick Leigh Fermor

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Lors de la messe le temps suspend son temps, je ne suis pas croyant mais savoure cet instant dans la chapelle du monastère. C'est beau. Ca me rappelle ce moment à Helsinki, à l'église Temppeliaukio. La sobriété et la solennité des lieux poussent à la méditation et au recueillement.​

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En sortant, le ciel se voile, on flâne dans les rues avant de nous poser pour attendre la marchroutka et là surprise... La dame qu'on avait vu à Adishi et qu'on se demandait comment elle avait pu traverser le torrent, à tel point qu'on pensait qu'il lui était peut-être arrivée quelque chose... La voilà !

 

Nous échangeons et apprenons qu'elle non plus n'a pas pu traverser. Chacun cherchant un chemin, l'un en aval l'autre en amont, nous nous ne sommes pas vus. Contrairement à nous, elle a préféré dormir à Adishi. Intérieurement je souris, les villageois doivent avoir l'habitude de voir les touristes revenir et leur offrir ainsi une nuit à plus ou moins bon marché...

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C'est vivants que nous revenons à Mestia, oui, on en aurait presque douté sur la route vu le Fangio qu'on avait... mais bon, il se signait, il y avait pas de quoi s'inquiéter après tout.

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Demain, départ pour Koutaïssi, on délaisse la relative fraîcheur des montagnes pour l'étouffante plaine !

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«Le plus grand voyageur n'est pas celui qui a fait dix fois le tour du monde. Mais celui qui a fait une seule fois le tour de lui-même.»

Gandhi.

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