
Jours 14 & 15 - Sesriem et Sossusvlei
14-15/05/2018
Direction les dunes, les fameuses qui se font désirer depuis si longtemps !
Mais avant ça, installation du camp à Sesriem et visite du canyon éponyme.
Ce dernier fait environ 50 m de profondeur et autrefois il fallait six cordes de vache pour y récupérer l'eau... Donnant lieu au nom de Sesriem signifiant "six cordes".
La balade est courte, le retour longe la route sous un soleil de plomb : je passe à la vitesse supérieure et presse le pas pour rentrer !

Aussitôt rentré qu'on repart vers la dune Elim pour le coucher de soleil. Son ascension est une horreur... Les chaussures pleines de sable, tu crois arriver au sommet quand un replat amenant à une nouvelle côte apparaît... Je me fais avoir une fois, deux fois, trois fois... Dix fois... Je comprends enfin ce que Moses me disait en bas "je commence à te connaître Clément et préfère te dire tout de suite de ne pas tenter d'atteindre le sommet, tu n'auras pas le temps, sinon part du principe que ce n'est jamais la fin de la dune que tu vois". Les autres me charrient "tu as compris Clément ? Quand tu vois l'océan c'est qu'il faut faire demi tour".


Finalement... Un replat m'attire et semble être le sommet, si ca ne l'est pas je m'arrêterai là pour observer le coucher de soleil. Mais c'est bon, la persévérance a payé.
De là-haut je surplombe toute la plaine de Sesriem et voit la délimitation avec le désert du Namib au loin... C'est là qu'on va demain.
Nuit terrible ! Un vent à défriser les moutons et du sable à réensabler tout le Groenland !
Le vent et le sable se faufile partout dans la tente. Je sors en pleine nuit en caleçon avec sur le visage lunettes de soleil et foulard ainsi que la lampe frontale... (Vive la dégaine !) pour tout fermer et même remblayer un endroit sous la tente que le vent creuse ! Retour à l'intérieur pour verrouiller tous les sacs et attendre...
5h30 le réveil (du moins pour ceux qui ont dormis !), avant de partir on décroche le haut de la tente pour limiter la prise au vent durant notre absence.
Direction la dune 45 pour le lever de soleil ! Marcher dans le sable est une véritable horreur !
Mais je suis heureux d'être le premier sur la ligne de crête et de créer ainsi ma trace. C'est à peu près la même jouissance que de faire sa première trace dans la neige.
Personne ne m'envie : c'est d'autant plus difficile d'avancer en terrain vierge.
Le sommet atteint je patiente tandis que d'autres me rejoignent peu à peu.
C’est beau… C’est infiniment beau… Le soleil émerge lentement de l'horizon… La surface du désert rougeoie… Les dunes s’enflamment… Le ciel d’un bleu pur… Les deux couleurs s’entremêlent, s’entrechoquent, s’illuminent… Ce lever de soleil sur la dune 45 est merveilleux et majestueux… Je demeure sans mot dire, admiratif devant la beauté de ce monde.
Il est temps de redescendre... Bien plus facile que la montée on se jette dans la pente raide. J'ai la sensation d'être sur la Lune en faisant d'aussi grands bonds tout en atterrissant en douceur... Un bonheur enfantin.
Reprise de forces avec le petit déjeuner avant de rejoindre Sossusvlei où le vent crée un véritable mur de sable d'une dizaine de mètres de haut... Le guide nous conforte : "le vent vient de derrière, vous voyez, plus loin il y a une dune, elle bloquera le sable et serons à l'abri".
Certains préfèrent demeurer dans le bus, la majorité prend le risque et s'équipe.




Pendant une bonne demie heure nous sommes littéralement dans le vent et le sable. La visibilité varie entre 5 et 10 mètres. L'atmosphère est des plus particulières, nous ignorons où nous sommes, le vent hurle dans nos oreilles.
Le guide sourit "la dune est là". Mais de quoi il parle ? Je ne vois rien... Si ce n'est une montée de 1 m... C'est ça notre dune protectrice ? Je grimpe le mètre et surplombe d'une trentaine de mètres une vallée déserte et désertée par le vent. Tous s'empressent de l'autre côté !
Le silence revient, notre esprit se réhabitue à voir loin... D'ailleurs apparaît au loin la big daddy la seconde plus haute dune du monde.
Après la misère d'hier et celle de ce matin, peu consentent à la gravir. D'abord 4 puis 5 et enfin 6. Nous nous détachons des autres et retrouvons plus loin le vent tandis que nous traversons un vaste sol blanchâtre.
Je décompose la dune en mon esprit. Il y aura 4 phases d'ascension de ce que j'observe. Et en effet...
La première est simple, c'est la mise en jambes. Sur la seconde le sable est dur mais les rafales de vent nous balaient. La troisième est la pire... Arrivés à son niveau, on change d'orientation et ne sommes plus à l'abri du vent. Je suis littéralement accroupi et ne peux avancer d'un pas. Les autres croient que je les attends et ignorent ce qui les attend... En prenant appui sur les bâtons je trouve un équilibre précaire et tente d'avancer ainsi. Mais le vent est traître et dessine sans cesse une nouvelle ligne de crête quand il ne la fragilise pas. J'entends des râlements derrière... Les autres comprennent enfin la raison de mon immobilisme passé.
Un lézard fait un magnifique saut périlleux devant moi, emporté par le vent.
"Un pas devant l'autre". Je me ressasse cette phrase même si ici ça serait plutôt "deux pas devant pour un derrière".
J'attaque le quatrième tronçon et le vent faiblit, je prends enfin le temps de me retourner et d'admirer ce paysage grandiose. L'un des plus beaux à n'en pas douter. Les lignes des dunes me fascinent tandis que les tâches blanches de calcaire et d'argile cassent la domination de l'ocre. Les autres en contrebas avancent en file indienne dans mes pas.
Je ne saurais décrire avec des mots tout ce qui me traverse l'esprit à ce moment-là. C'est vraiment un lieu inspirant et inspiré.
Bref, avance feignasse ne trouve pas une excuse pour faire une pause.





Arrivés en haut, nous nous félicitons et sommes heureux d'avoir entrepris cette montée tant le paysage prend au coeur. On profite et entamons près de 350 m de descente à la quasi verticale semblable à des gosses pour atteindre la dead vlei emblématique du pays, et qui plus est, à l'abri du vent car protégée par la big daddy.
Au coeur de la dead vlei, coincés dans le désert, les arbres fantomatiques paraissent aussi isolés que désolés. Quelques ombres se faufilent parmi eux et semblent leur conférer un peu de vie. Vie qui n’aurait pas encore été emportée par le Styx.
C’est une vue qui saisit le cœur, une vue sinistre à la beauté fanée et surannée, une forme de nostalgie mêlée de mélancolie, néanmoins, toute cette dureté devient au fil des secondes qui passent pure douceur et tendresse.
Le vent se lève, léger, mais cela suffit pour que le sable s’envole, tournoie et se loge dans nos vêtements. Je rêverai longtemps de ce lieu inspirant où quelques marcheurs s’égarent sur la ligne de crête de la dune.
Il y a d'ailleurs en ces dunes et en cette terre blanche une atmosphère fabuleuse. Aucun bruit. Le vent semble être des esprits chamaniques d’antan.
Une terre de légendes lentement dégradée par les éléments imprime un souvenir à vie dans la mémoire du voyageur.
J’imagine les pensées des premiers colons, qu’ont-ils ressentis en foulant ce sable et ce paysage énigmatique… Avaient-ils peur ? Etaient-ils admiratifs ? Ou simplement opportunistes et intéressés par la richesse de ces sous-sols ? Je ne sais pas. Pour ma part j’ai le souffle coupé et décompose chaque rayon lumineux qui révèle cette dentelle géologique.
C'est sur ces notes admiratives que nous retournons au camp et découvrons avec plus ou moins d'horreur l'état de nos tentes ensevelies.
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Avec tous ces kilomètres avalés à travers le territoire namibien, je reviens à Windhoek où je m’apprête à prendre l’avion le lendemain pour retourner en France. Ca marque la fin de ce carnet de voyage… Il y aurait tant d’autres choses à écrire, tellement de rencontres à évoquer, de lieux à décrire et à faire partager...

