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Parc National de Bwindi
10-11/02/2021
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Ce matin on prend la direction de Rushaga, porte d'entrée de la forêt impénétrable de Bwindi.
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On quitte la savane de Queen Elizabeth pour retrouver les vertes collines ougandaises. La route est longue, plusieurs heures… Mais ce n’est pas sans un certain plaisir je dois l'admettre. Ces collines me fascinent, tantôt recouvertes d’une dense forêt, tantôt de plantations de thé, parfois d'eucalyptus qui surgissent en points de ponctuation au milieu des champs, sans omettre ces plantations de bananes.
Il y a énormément de couleurs et de textures dans ces paysages. C’est la grande richesse de ce pays, une beauté brute et sauvage.
Nous roulons depuis plusieurs heureux déjà, sur des pistes la plupart du temps, toutes cabossées, zigzagant entre les camions déglingués allant et venant.
Au fur et à mesure qu’on approche les panneaux publicitaires promouvant la rencontre avec les gorilles se multiplient. Il faut dire que ces derniers sont devenus en deux décennies la ressource économique la plus importante du pays… Ce programme de rencontres initié en 1997 a pour but de montrer aux populations locales qu’elles ont davantage à gagner en préservant leur milieu naturel qu’en le détruisant.
L’ambiance aux environs de Rushaga est bien différente de celle dans laquelle nous baignions alors jusqu’à présent… Les enfants ne nous saluent plus par bonheur innocent mais par des « money money » de plus en plus agressifs. Cela peut se « comprendre » quand on connaît le prix des permis pour voir les gorilles (qui ont été réduits de près de 50 % en raison de la pandémie) et le salaire moyen dans le pays… Ils nous perçoivent comme des millionnaires… Je m’imagine bien si je venais à dormir dans la rue et que je voyais passer la voiture de Jeff Bezos, face à son indifférence quant à ma situation, une certaine rancœur, voire de haine, ne naîtrait-elle alors pas en mon esprit ?
Pourtant, on le sait tous, raisonner ainsi c’est tomber dans la facilité. Je me rappelle que dans l’association ENACTUS on nous disait « pour aider quelqu’un à se nourrir ne lui donne pas du poisson mais apprend lui à pêcher ». Il en va de même ici : donner un billet à quelqu’un plutôt qu’à un autre ne résoudra pas la situation, au contraire d’ailleurs. En revanche faire participer l’économie locale en venant séjourner dans ces zones, en y employant des guides, en y consommant, là on a un impact.
Ce n’est pas en donnant qu’on aide le mieux, c’est en étant le carburant d’une activité génératrice de revenus… en espérant que ces derniers soient utilisés à bon escient évidemment. Le comprendront-ils ?
Après cette longue route, on arrive enfin à notre lodge, situé à 10 minutes à pied de l'entrée du parc national.
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De notre chambre, la forêt impénétrable se déploie. Elle semble porter en elle l'origine du monde, on aimerait croire que c'est un lieu où l'humanité n'aura jamais la main mise.
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On profite de l'après-midi pour ne rien faire, se reposer, se renseigner sur le pays mais aussi pour réadapter la fin de notre voyage suite à la suppression de notre vol retour.
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On y est, c’est aujourd’hui qu’on rencontre les derniers gorilles des montagnes dans la forêt impénétrable de Bwindi, rendus célèbres par Diane Fossey.
Chaque famille de gorilles peut être observée au maximum par 8 personnes par jour. Ici, à la porte de Rushaga, il y a 9 familles. Habituellement, il faut réserver près de 6 mois à l’avance les permis… Avec la covid le taux de fréquentation a grandement baissé, pour preuve, nous avons réservé au dernier moment et nous ne sommes que deux groupes à prendre le départ ! Certains diront que c’est une bonne chose cette baisse de fréquentation, après tout « qu’on laisse les gorilles tranquilles ! ». Malheureusement, la question est un peu plus complexe, faut-il rappeler l’assassinat de Rafiki, l’un des symboles du pays, le plus vieux gorille de la réserve, lorsqu’en vidant les parcs nationaux de leurs visiteurs la COVID a laissé le champ libre aux braconniers ? Tout le but des autorités est de faire en sorte qu’un gorille vivant rapporte davantage d’argent qu’un gorille mort… et cela passe par le tourisme.
Avant d’entamer la marche on a un briefing avec les rangers qui nous expliquent quelques règles de base. Pour la petite anecdote, si on veut faire pipi il faut dire « Number One », si on veut faire la grosse commission il faut dire « Number Two ».
Pendant la constitution des groupes, on découvre une touriste en jean avec des tennis aux pieds… En voilà une qui ne doit pas être dans le pays depuis bien longtemps… Quand on voit l’état de nos vêtements et chaussures à chaque fin de journée de marche, on lui souhaite bon courage.
Allez, on s’enfonce progressivement dans la forêt dense, accompagnés de militaires armés une nouvelle fois, pour, a priori, nous protéger des éléphants forestiers qui peuvent se montrer très agressifs.
Le sentier est bien tracé au début, mais nous le quittons rapidement et tentons de se frayer un chemin à coup de machettes à travers les buissons, les plantes, les arbres. Seules nos têtes émergent de la végétation. Partout, les frondaisons habillent le paysage.
La progression est lente… Les éclaireurs nous guident par talkie-walkie. Au loin nous entendons les gorilles, nous sommes proches. Le guide nous dit toutes les 20 min qu’il reste 20 min. Néanmoins, c’est bon, au bout de 3 h de marche on nous indique qu’on est proche. Nous abandonnons là nos sacs et parcourons les derniers mètres jusqu’à la famille de gorilles.
C’est là que nous les découvrons, dans une pente sur un fond vert émeraude, avec un nuage d’insectes volant dans toutes les directions.
Les adultes sont assis et mangent, les petits jouent, se chamaillent. Le chef de famille est impressionnant, il demeure calme et stoïque. On scrute leurs corps, leurs mains, on se réjouit de leurs expressions. Il y a une forme de naïveté et d'innocence dans leurs regards.
Ils demeurent totalement indifférents à notre présence, et tant mieux. La rencontre bien qu’elle soit incroyable est bien moins émouvante que celle avec les chimpanzés. Il faut dire que ces derniers avaient des réactions si proches des nôtres que c’en était troublant.
L’ensemble de la famille, d’un commun accord, décide d’abandonner le lieu et de retourner vers leur nid. C’est là-bas que nous découvrirons le plus petit du groupe, petite boule hirsute avec des yeux grands ouverts.
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A ce moment-là, qui du gorille ou de l'homme se distrait le plus en regardant l'autre ?
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